Deux semaines de course effrénée viennent de passer entre Bristol et la France pour dire au revoir aux collègues, aux amis, à la famille, et c’est par un dernier sprint à Roissy-Charles de Gaulle que nous embarquons in extremis le 22 Mai sur le vol Paris – Le Cap qui nous emmène vers seize mois de vacances, et bien plus encore ! (Merci la grève des contrôleurs aériens pour ce petit coup de stress 🙂 )

L’arrivée au Cap se fait de nuit, et c’est bien fatigués, mais heureux et tout excités, que nous posons nos sacs pour une semaine dans cette grande ville et ce petit appartement tout confort déniché sur Airbnb. Le matin, une agréable surprise nous attend avec une superbe vue sur la ville et les montagnes qui la dominent.


Au petit-déjeuner, nous prenons connaissance des recommandations pour économiser l’eau car la ville fait face à une sérieuse pénurie depuis quelques années (ils en sont même à envisager de tracter un iceberg depuis l’Antarctique). Puis c’est l’heure de partir découvrir Le Cap !
On opte pour une marche guidée sur le thème de l’Apartheid. Entrée en matière très culturelle ! Au travers des monuments clefs de la ville, on en apprend plus sur cette sombre période et ce système politique de ségrégation raciale mis en place par un gouvernement d’Afrikaners blancs pour contrôler les populations noires indigènes majoritaires.
Devant la Cour Suprême, le guide explique comment les Sud-Africains étaient classés par catégorie (du plus au moins privilégiés : Blancs, Métis et Noirs). La méthode est relativement simple : on vous place un stylo dans les cheveux et vous demande de sauter 3 fois sur place. Si le stylo tombe, vous avez de fortes chances d’être blanc, si le stylo reste, vos droits sont limités car vous tombez dans l’une des 2 autres catégories… autant dire que suivant cette méthode, Damien verrait probablement ses droits limités.

Le lendemain matin, visite au musée du District 6, un quartier du Cap à l’origine cosmopolite, rasé au bulldozer sous l’Apartheid pour en faire une zone blanche (c’est-à-dire interdite aux Noirs) et dont les habitants furent expulsés et déplacés dans les townships en périphérie. Un ancien habitant du quartier s’occupe de la visite, ce qui la rend relativement émouvante. Au sol, les expulsées ont retracé le plan du quartier et indiqué leur logement en y inscrivant leur nom. Au mur, on découvre diverses anecdotes ainsi que les pass books, ces sortes de cartes d’identité indiquant la « catégorie raciale » du propriétaire et que les Noirs/Métis devaient être en mesure de présenter 24h/24, 7j/7 sous peine d’être emprisonnés.

Dans l’après-midi, direction le township de Langa, un des plus vieux du Cap. Ici, les Blancs ne se baladent pas seuls et notre taxi s’assure que nous retrouvons bien quelqu’un avant de nous laisser dans le quartier…
Notre guide, Zuzeka, est née, a grandi et vit toujours à Langa avec sa famille. On commence par les habitations les plus précaires : des containers transformés en logements où des familles vivent dans une unique pièce – la cuisine, les WC et la salle de bain sont partagés dans un autre bâtiment. Plus loin, on s’enfonce dans une allée où s’alignent des shacks, ces habitations construites de bric et de broc, une tôle en guise de toit. Le shack que l’on visite est un trois pièces – salon, chambre/cuisine, et seconde chambre – avec l’électricité mais pas l’eau courante, et dont le propriétaire est un vrai McGiver transformant blender en lampe de chevet et corbeille à fruits en abat-jour.
Lors de la visite, on réalise que le township est organisé en quartiers avec boutiques, écoles, poste de police. Tout le monde n’y est pas logé à la même enseigne : les plus pauvres s’entassent dans les shacks ; un peu plus chanceux sont ceux qui bénéficient d’un logement construit par l’État, sorte de HLM visant à améliorer la salubrité du township ; enfin viennent ceux qui ont réussi, avec maisons individuelles sécurisées, restés au quartier comme pour montrer l’exemple, montrer que malgré tout il est possible de s’en sortir.

Pour conclure sur le thème de l’Apartheid, direction Robben Island où Nelson Mandela a été détenu pendant 18 ans. La visite commence par un historique de l’île qui servit tour à tour de léproserie, d’hôpital psychiatrique et de poste de défense pendant la seconde guerre mondiale, avant de devenir une prison de sécurité maximale.

La visite est animée par Sipho, arrêté à 21 ans et condamné à 7 ans de prison pour avoir organiser des meetings de l’ANC (le parti politique de Nelson Mandela). Il nous décrit les conditions de détention, la torture, mais aussi les liens complexes qui se développaient entre gardiens et prisonniers (ces derniers instruisant même parfois les premiers). Le clou de la visite est bien sûr la cellule de Mandela telle qu’il la trouva à son entrée en prison : quelques couvertures à même le sol en guise de lit, un tabouret et un pot en fer. Face au monde qui s’amasse devant la cellule pour prendre en photo le maigre mobilier, Damien craque et photographie une cellule voisine au confort tout aussi rudimentaire.

De retour au Cap, nous allons voir les maisons aux couleurs acidulées du quartier musulman de Bo-Kap. Ici, on se fait discret car les touristes ne sont pas spécialement les bienvenus ; une manifestation a même eu lieu la veille pour y dénoncer la gentrification… A la fin de ce troisième jour, on se prend pour des locaux et on file à Signal Hill pour profiter du coucher de soleil sur l’océan 🙂

Le lendemain, on troque les visites socio-culturelles le temps d’une journée de randonnée au sommet de Table Mountain, l’iconique montagne aplatie qui nous nargue depuis la baie vitrée du salon. On file au petit matin pour éviter une ascension en pleine chaleur.
Après trois heures de grimpette par un chemin bien raide aménagé en escaliers, on atteint le plateau et on profite de la vue magnifique sur Le Cap et sa baie avec un pique-nique bien mérité. Cinq minutes seront suffisantes pour redescendre les 1000 mètres de dénivelé avec le téléphérique (vertigineux s’abstenir).

Un passage dans le quartier tendance de Woodstock est l’occasion de flâner entre boutiques, bars et cafés et de découvrir un peu de street art sud-africain. C’est là que vit Julien, un copain d’Albi, que nous retrouvons le soir pour partager un bon repas et recevoir ses conseils avisés pour nos prochaines étapes en Afrique du Sud !
