Poursuivant nos passages de frontières terrestres en Afrique, et après avoir lu plein de revues positives, on prend la décision de quitter la Zambie par voie ferroviaire. Le train express opéré par la Tazara (TAnzanian-ZAmbian Railway Authority) part de Kapiri Mposhi, une ville zambienne située à deux-cents kilomètres et quelques trois heures de bus de Lusaka. Il quitte la ville tous les mardis et est censé arriver à Dar es Salam en Tanzanie deux jours plus tard, soit un jour de moins que le train plus lent qui lui part tous les vendredis.
Plus tôt dans la semaine, on a réservé deux couchettes en seconde classe via Whatsapp, suivant la procédure en vigueur dans ce coin du monde. On sait déjà qu’on sera séparé car ici hommes et femmes ne dorment pas dans un même compartiment à moins d’en avoir réservé tous les lits.
C’est sur le coup des 6h00 qu’on se lève ce mardi 17 Juillet pour espérer embarquer à bord des premiers bus qui partent entre 7h00 et 7h30 pour Kapiri Mposhi. Avec une arrivée prévue vers 10-11h00 cela devrait nous laisser assez de temps pour manger, retirer de l’argent et faire quelques courses avant d’embarquer notre train qui part à 16h00.
On a bien repéré une compagnie de bus, Powertool, qui a l’air sérieuse mais arrivés dans le chaos de la station de bus de Lusaka, on se fait alpaguer par les rabatteurs de la compagnie Scorpions Motorways qui nous assurent un départ à 7h30 pour un prix inférieur d’une cinquantaine de kwashas à ce qu’on avait lu sur plusieurs sites internet. On leur fait confiance et on embarque dans le bus. A 7h30, le bus reste à quai. Gisèle va s’enquérir de la situation et le vendeur de tickets annonce un départ à 8h00, ça nous fait bien un peu râler mais ça nous laisse toujours une marge confortable pour prendre notre train. On se rassoit tranquilles.
A 8h00, le siège du conducteur est toujours désespérément vide et à 8h30, on commence à vraiment être désagréables. Le vendeur de ticket nous annonce un départ dans pas longtemps, un autre nous dit qu’il est le manager et que le bus partira à 9h00. On a vraiment l’impression d’être pris pour des idiots ! Au final le bus part avec 1h30 de retard sur l’heure annoncée et on apprend à nos dépends qu’en Zambie, le transport de voyageurs est un marché privé et tandis que certaines compagnies assurent des départs à horaires fixes d’autres ne font partir leur bus qu’une fois ceux-ci pleins. C’est le cas de Scorpions, qui pour le coup nous a bien arnaqué …

On en est quitte pour un peu de stress et de mauvaise humeur qu’on n’hésite pas à partager avec le contrôleur dont les excuses sonnent bien faux. Sur le coup des 11h00, et alors qu’il ne reste qu’une heure de route d’après Google Maps, le bus marque une pause pour le déjeuner. Une heure plus tard, on n’est toujours pas reparti et des gens s’affairent autour du moteur. Le contrôleur et le chauffeur nous resservent des salades en nous disant qu’on part dans cinq minutes. Au bout d’une demi-heure supplémentaire on a bien compris qu’ils n’ont aucune idée de quand on va repartir et le temps s’amenuisant, on prend nos sacs pour finir la route en taxi.
Malgré une négociation du prix en bonne et due forme, le taxi nous réserve une petite surprise à deux kilomètres de l’arrivée en nous demandant un extra pour nous déposer devant la gare. C’est la goutte de malhonnêteté qui fait déborder le vase et on décide de finir à pied en oubliant de faire des courses et de retirer de l’argent. On se dit qu’on trouvera bien quelque chose à la gare…

Manque de chance, la gare est un immense hall vide de tout sauf de voyageurs qui attendent patiemment sur des bancs. On se rend au guichet pour retirer et payer nos billets et là deuxième problème : ils ne prennent pas la carte. On n’a bien sûr pas suffisamment de liquide pour payer les billets et il n’y a aucun distributeur à proximité… Du coup, on se met en quête de touristes à l’air plutôt sympa, avec qui on pourrait échanger quelques euros contre des kwashas. On est en train de discuter avec deux néo-zélandaises moyennement intéressées par la transaction car presque aussi fauchées que nous quand on reconnait Dirk, un allemand qui est resté quelques jours au Natwange backpackers avec nous à Lusaka ! Banco, il est d’accord pour nous échanger 550 kwashas contre une quarantaine d’euros, ce qui nous permet d’acheter nos billets. Il nous reste vingt minutes pour souffler avant d’embarquer et on peut continuer la conversation avec nos nouvelles rencontres, Sarah et Phoebe de Nouvelle-Zélande et notre sauveur, Dirk.

A 16h00, on prend possession de nos couchettes et c’est parti pour 46h de train d’après Tazara. Gisèle partage son compartiment avec quatre zambiennes et une japonaise. Damien est le seul touriste dans son compartiment mais ses colocataires le mettent tout de suite à l’aise en partageant avec lui cacahuètes et bananes pendant que chacun se présente.

On se retrouve au wagon bar-restaurant où on prend une bière à un prix défiant toute concurrence (moins de 1€) et on engage la conversation avec deux zambiens se rendant eux-aussi en Tanzanie, l’un pour acheter du riz, moins cher de l’autre côté de la frontière, et l’autre pour acheter des voitures.
Le restaurant propose un unique plat pour le dîner : daurade, colza râpé et n’shima. Bien meilleur que les sandwichs triangles proposés par la SNCF et le moins cher des repas qu’on a mangé en Zambie (moins de 2€).

Le lendemain, la journée se déroule tranquillement entre lecture, sieste et sudoku. A chaque gare, on observe le ballet des vendeurs qui, plats sur la tête, proposent bananes, cassavas, épis de maïs, sodas, etc. Vers midi, on passe la frontière tanzanienne. Les douaniers montent dans le train pour récupérer les passeports et l’argent afin de faire les visas, suivis d’une cohorte d’agents de change qui proposent des shillings tanzaniens contre des kwashas zambiens. On change notre dernier billet de dix kwashas et on se rend compte qu’on est vraiment ric rac pour la suite du trajet… heureusement que Dirk n’est pas loin et nous sort une nouvelle fois de cette mauvaise passe financière !



Le soir, on est invité à boire un verre dans le compartiment des néo-zélandaises, Sarah et Phoebe, avec d’autres touristes. Dirk a ramené sa guitare et s’avère être un très bon chanteur ; il nous chante même du Brel dans un français pas si mal que ça. Tout le monde a un petit coup dans le nez, et l’ambiance joyeuse nous accompagne jusqu’au coucher.


Notre deuxième journée dans le train ressemble pas mal à la première sauf que l’on fait davantage attention aux paysages qui sont plus beaux de ce côté de la frontière. Les colocataires de Damien le préviennent qu’on devrait passer par la Selous Game Reserve et qu’on pourra certainement voir quelques animaux. Malheureusement pour nous, les retards accumulés font qu’on atteint la réserve en plein milieu de la nuit, raté pour voir quoi que ce soit.



On atteint Dar Es Salam sur le coup des 3h00 du matin le lendemain après une courte nuit pour Damien, lui et ses colocataires ayant prolongés les bavardages jusque tard dans la nuit, convaincus d’une arrivée imminente. La ville étant réputée un peu craignos, les employés du train autorisent les passagers à finir la nuit dans les compartiments et ce n’est qu’à 6h00 du matin qu’on décide de partir, accompagnés de Sarah et Phoebe. On traverse la gare où nombre de gens sont allongés à même le sol, la tête sur leurs bagages, sans doute les passagers du premier train de la journée.

A Dar Es Salam, Uber nous facilite bien la tâche pour rejoindre notre hôtel. On embrasse Sarah et Phoebe sur le quai et rendez-vous est donné à Zanzibar dans une semaine pour faire la fête à la Full Moon party de Nungwi. Pour l’heure, on va prendre une bonne douche et se reposer de ces 46 heures de train qui se sont transformées en 72…
Morale de l’histoire : avec les transports en Zambie, on n’est jamais sûr d’arriver à l’heure mais garantis d’avoir des souvenirs mémorables !