Aotearoa ! Nous atterrissons au pays du long nuage blanc après douze heures d’avion et une longue pause à l’aéroport de Sydney. Il est 3h00 du matin et nous voici dans l’endroit du globe le plus diamétralement opposé de notre point de départ : Christchurch, sur l’île Sud de la Nouvelle-Zélande.

Compte tenu de l’heure avancée à laquelle nous atterrissons dans la nuit, nous faisons le choix de ne pas réserver d’hôtel et finissons la nuit à l’aéroport. La lecture de l’intéressant site internet « Sleeping in airports » nous apprend que l’aéroport de Christchurch n’est pas reconnu pour son accueil de dormeurs de passage, ces derniers se faisant souvent réveiller par les brigades de sécurité.
On arrive quand même à dégotter deux sièges un peu à l’écart et bien confortables. Parfait ! Le hic, c’est qu’on n’a pas du tout sommeil… Damien est excité du match du PSG à venir et Gisèle est à fond sur le blog après une bonne douche et un gros café (qu’est-ce qu’on aime les aéroports avec des douches en libre service).

A 10h00, la défaite du PSG consommée et mal digérée, nous sommes prêts à prendre possession du van qui sera notre maison et moyen de transport pour les semaines à venir.
Le travail en amont (et la comparaison de nombreuses options, voiture ou van, et de nombreuses entreprises) nous amène chez Rental Car Village, une entreprise familiale qui loue des vans un peu vieux mais bien entretenus et correspondant tout à fait à notre budget.

Le très sympathique réceptionniste est café au lait mais, sous la couche de crème certainement indice 100 dont il est couvert, il apparait plus blanc que nous après six ans en Angleterre. Et oui, c’est qu’il ne faut pas oublier qu’ici les UV sont bien plus agressifs à cause du trou dans la couche d’ozone qui rôde dans le coin.
Nous prenons possession de notre van et partons illico nous ravitailler au supermarché le plus proche avant de nous lancer sur les routes néo-zélandaises. L’excitation nous tient éveillé jusqu’à Tekapo et son superbe lac, première étape du roadtrip.
Notre van n’étant pas « self-contained », c’est-à-dire équipé d’un réservoir d’eau et d’un système de récupération des eaux grises, nous ne pouvons pas faire du camping sauvage (sous peine de lourdes amendes). L’application Campermate nous aide à choisir un camp approprié et nous coupons le moteur au bord du lac Mac Gregor sur lequel glissent cygnes, grues et canards.
Le camping est sommaire – un bloc WC sans douche, un point d’eau pour la vaisselle et pas d’électricité – mais le superbe cadre vaut tout l’inconfort du monde !


Rattrapés par la fatigue, et la pluie, nous nous endormons sans peine avant le coucher du soleil.

La région de Tekapo étant classée parmi les meilleures pour observer le ciel nocturne, grâce notamment à sa faible couverture nuageuse et sa pollution lumineuse extrêmement bien contrôlée, nous ne résistons pas longtemps à réserver une sortie astronomique (par chance, il reste des places pour le soir même).
En avant-goût de la soirée, nous montons à l’observatoire astronomique du Mont John pour une vue imprenable sur le lac Tekapo. Le jaune orangé de la végétation qui dévale les pentes fait ressortir le bleu surréel du lac…

La couleur serait en fait due à la présence de micro-particules de roche en suspension dans l’eau qui diffractent la lumière de telle manière que le bleu ressort plus que toute autre couleur (ah science, quand tu nous tient…).

De retour de balade, nous recevons les nouvelles de deux amis de Bristol, Emeric et Laura, partis peu après nous pour un an de voyage. Ils sont aussi à Tekapo et nous convenons de nous retrouver pour dîner ensemble. Eux ont opté pour l’option « voiture-auberge » plutôt que « campervan » et c’est donc dans le confort de la cuisine de leur auberge qu’ils nous reçoivent.

A 23h00, nous avons rendez-vous avec les étoiles. Nous prenons congés d’Emeric et Laura et allons rencontrer « les astronomes » de l’agence Silver River. Encore une fois l’excitation et la curiosité effacent toute fatigue. Le ciel est d’une pureté incroyable. Au-dessus de nous, la voie lactée brille de mille feux.
Nous apprenons à repérer à l’oeil nu la croix du Sud, la constellation d’Orion et celle du Scorpion avant de s’essayer à l’observation au télescope. On trépigne comme des enfants pour voir la rouge Antares, la bleue Cyrhus et la nébuleuse de la Tarantule.
La séance se termine alors que Jupiter se lève à l’horizon, il est 1h45.

Sans douche, la routine matinale est plus rapide. Un bol de céréales, un café, et voilà que Bongo avale déjà les kilomètres asphaltés et que nous nous émerveillons devant les paysages qui défilent devant nous.
Après les eaux turquoise du lac Tekapo, nous longeons le lac Pukaki. Au détour d’un virage, l’incroyable Mont Cook se révèle avec sa suite de glaciers.

C’est vers lui que nous nous dirigeons par le Hooker’s Valley Track, un superbe sentier de 3h aller-retour qui serpente le long d’une rivière glacière et débouche sur le lac Hooker au pied du glacier du même nom, le mont Cook dominant en arrière-plan.



Sur la route pour Queenstown, nous profitons de quelques campings gratuits en bord de lac. Les nuits sont fraiches à cette saison et ça ne réussit pas du tout à la batterie du van… heureusement on peut compter sur la gentillesse et la préparation des néo-zélandais qui nous aident à faire démarrer le van.

Queenstown est reconnue comme la capitale mondiale de l’aventure. Des montagnes environnantes, on s’élance en parapente en été et on dévale tout schuss en hiver. Nous ne marquons qu’un rapide stop dans la ville, le temps de remplacer la batterie de Bongo, de profiter d’un beau point de vue depuis la plus proche colline et de manger un Ferg’s Burger. Une véritable institution ici ! Les gens font la queue souvent des heures pour goûter aux burgers soi-disant les meilleurs au monde ! Chanceux, on n’attendra qu’une demi-heure mais honnêtement on les trouve un peu prétentieux.


Mieux que de rester à Queenstown, nous avons en tête de faire la Routeburn Track, une randonnée sur 3 jours conseillée par des amis. Malheureusement pour nous, à cette période de l’année les refuges du sentier sont déjà complets. Ils sont de toute manière hors de prix, 130$ NZ (soit 75€) pour les étrangers pour un simple matelas en dortoir, sans couverture, sans sac de couchage, sans douche, sans ustensiles de cuisine… On se contentera donc d’une seule journée de marche.

Le plan est de réaliser le tiers du sentier avant de rebrousser chemin, soit 22 km dans la journée. Afin de ne pas perdre de temps le matin, on s’arrête au camp le plus proche du départ. Celui-ci s’avère infesté de sandflies (ou phlébotomes), de petites mouches assoiffées de sang dont les piqûres sont insupportables tellement elles grattent.
Avant d’arriver au camp, les chaussettes sont donc remontées sur les pantalons et on s’asperge copieusement de répulsif. Nous passerons la soirée enfermés dans le van à chasser tout insecte volant, incrédules devant ceux qui se baladent dehors en short-débardeurs-tongs, leurs tentes grandes ouvertes…

Il n’est pas encore 8h00 du matin que nous foulons déjà le sentier extrêmement bien maintenu du Routeburn Track. Celui-ci commence dans un sous-bois mousseux avant de s’enfoncer dans une forêt de hêtres tapissée de fougères. On longe les eaux claires et turquoises de la rivière Routeburn puis on profite de superbes vues sur les plaines et les sommets environnants.
Le Routeburn Track est considéré comme le plus beau des sentiers de Grandes Randonnées de Nouvelle-Zélande et on comprend pourquoi.




Passé le premier refuge, le paysage change radicalement. Nous avons pris de la hauteur et les vertes fougères sont remplacées par des tussocks couleur or. On grimpe encore et le paysage s’ouvre sur le lac Harris dominé par des sommets écorchés. La fine pluie qui nous rafraichit n’enlève rien à la superbe du paysage.



On rebrousse chemin au point le plus élevé de la rando, le col du Harris Saddle, à 1277 mètres d’altitude. Malheureusement, les nuages sont de la partie et nous ne pouvons pas profiter du panorama censé se dévoiler de l’autre côté du col. D’où l’on vient en revanche le temps s’est éclairci et on apprécie revoir les paysages du matin.
Après tous ces efforts, l’appel de la douche se fait vivement ressentir. Un coup d’oeil à Campermate et on dégotte le rêve de tout « van lifer » (selon la sémantique adaptée) : Lumsden. Un village de moins de 500 habitants, sans attrait touristique mais pas très loin de la route principale et qui propose un stationnement gratuit avec WC et eau courante, et surtout une douche chaude à la piscine communale pour quelques dollars. On apprécie tellement l’accueil de la ville, qu’on délaisse nos céréales pour un petit-déjeuner plus copieux au café Route 6 (qui dispose d’un très bon wifi qui plus est, fait assez rare en NZ pour être noté). L’occasion de faire du trois en un : manger, charger nos équipements électroniques et mettre à jour notre vie virtuelle.

Dans l’après-midi nous nous rapprochons de notre prochaine visite : le Milford Sound, un fjord dont les parois verticales taillées par un ancien glacier plongent vertigineusement dans des eaux calmes et noires. La visite du fjord consiste en une croisière matinale et nous dormons donc dans un camping de la vallée qui y mène afin d’arriver en temps et en heure.

On lève le camp dans l’obscurité de la nuit et on suit jusqu’au fjord la route qui serpente telle une rivière entre des sommets immenses et désolés. Le bleu-violet du ciel à l’aube ajoute un air dramatique au paysage et on a l’impression de descendre dans les entrailles de la Terre.
Arrivés à l’embarcadère de la croisière, les eaux tranquilles nous offrent déjà de superbes reflets.

La croisière se déroule sous un soleil radieux et le regard embrasse autant les eaux sombres que le haut des falaises d’où se jettent de nombreuses cascades. On est exceptionnellement chanceux car les journées dégagées sont plutôt rares par ici. Imaginez, ils prévoient 11 mètres de pluie pour la seule année 2019 ! Encore un moment fort du voyage dont on se souviendra.


On profite de la journée ensoleillée pour monter au lac Marian situé sur la route du retour. Le sentier est extrêmement boueux à cause des récentes pluies, Gisèle en perd même une chaussure, mais les efforts sont rapidement récompensés lorsque l’on découvre le lac au sommet.
Le roadtrip continue et avec lui son lot de beaux paysages.
